Nostoc

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Nostoc est un genre de cyanobactéries de la famille des Nostocaceae. Le mot « nostoc », dont l'étymologie est discutée[1], pourrait avoir été forgé par Paracelse (nostoch).

Ce genre regroupe des organismes procaryotes réalisant la photosynthèse et fixant l'azote. Ils ressemblent souvent aux algues, mais peuvent vivre sur des substrats terrestres en colonies importantes, et alors former des masses gélatineuses évoquant certaines algues, notamment lorsque leurs structures se gonflent d'eau après la pluie ou en période humide.

La discrétion de leurs colonies lorsqu'elles sont déshydratées et la rapidité de leur croissance et turgescence lorsqu'elles sont exposées à l'humidité ont fait croire qu'elles tombaient du ciel (apparition fréquente au petit matin lorsque quelques gouttes de pluie nocturne ou de rosée ont été collectées par la surface du sol), d'où leur nom plus courant de « crachat de lune[2] » ou star jelly pour les anglophones (soit « gelée d'étoile »), d'autres noms vernaculaires correspondant à diverses origines leur étant associés (witches butter « beurre de sorcière », mare's eggs « œufs de jument »).

Ce sont des espèces pionnières, qui peuvent vivre dans des milieux pauvres et basiques. Formant parfois de véritables tapis, des nodules[3] ou des boules, atteignant en zone polaire plusieurs centimètres de diamètre[4], elles jouent localement un rôle très important en matière de protection des sols contre l'érosion éolienne et hydrique et la déshydratation sur certains sols en pente ou semi-désertiques. Lorsqu'elles meurent et se dégradent elles contribuent à former la matière organique du sol.
Leur récolte intensive en Chine est une des causes d'augmentation de l'érosion et de la dégradation de certains sols très vulnérables[5].

Étymologie[modifier | modifier le code]

L'origine du mot Nostoc est incertaine, une hypothèse est qu'il aurait été créé par Paracelse à partir du vieil anglais Nosthryl (nostril) et du mot germanique correspondant Nasenloch (Nostoch)[6].

Identification, taxinomie[modifier | modifier le code]

Une des multiples formes du genre Nostoc, ici prélevée sur un substrat au pH très basique, sur un bord de canal, dans le nord de la France

La classification des espèces de ce groupe a beaucoup varié, et pourrait encore être modifié avec les progrès de la connaissance sur la génétique du genre[7].

Leur identification, comme celle des cyanobactéries en général[8], relève de spécialistes, qui s'appuient sur la morphologie des filaments bactériens, des cellules végétatives, des hétérocystes et des akinètes (tous ces éléments devant être au moins observés en microscopie optique sur un échantillon quantitativement et qualitativement représentatif). La forme et l'aspect de la colonie, la forme des cellules terminales des fibres bactériennes, ou encore la présence de vésicules, de mucilages, d'une gaine plus ou moins épaisse et de gaz, ainsi que les caractéristiques du cycle de vie, sont des caractéristiques complémentaires nécessaires à l'identification de certains genres.

Au début des années 2000, sur des résultats de génétique, la séparation des genres Nostoc et Anabaena fait encore l'objet de discussions, par exemple par Henson & alii[9] et Tamas & al.[10] par exemple, Trichormus azollae pourrait peut-être devoir être classé parmi les espèces du genre Nostoc[9][pas clair].

La PCR (polymerase chain reaction) commence à pouvoir être utilisée[11]. Des données sont accessibles dans Genbank[12].

Selon de premières analyses phylogénétiques portant sur l'étude de l'ARN, une importante hétérogénéité des souches de Nostoc laisse penser que le genre Nostoc est un cluster monophylétique qui pourrait contenir plus d'un genre[13].

Les teneurs et compositions en acides gras des cyanobactéries et de différentes souches de Nostoc ont été étudiées, notamment comme marqueurs chimiotaxonomiques[14]. Une étude faite sur plus de 20 souches laisse penser que les souches hépatotoxiques pourraient être regroupées par ce moyen. Certaines souches de Nostoc produisent des quantités importantes d'acides gras essentiels (Oméga 5, 6, 7, 9, 12)[14].

Description[modifier | modifier le code]

Nostoc, espèce pionnière qui apparaît après la pluie d'été. L'aspect gélatineux, plus ou moins verdâtre et tremblant, et les apparitions soudaines lui valent le nom de « crachat de lune », « crachat du diable », « morve d'étoile », « star jelly » (« gelée étoilée ») ou « merde du coucou » selon différentes superstitions populaires[15].

Les espèces du genre Nostoc peuvent prendre des formes très variées, et se présentent souvent très différemment selon qu'on les observe à échelle macroscopique (colonies) ou microscopiques (filaments bactériens).

  • Certaines espèces, quand elles vivent en colonies, ont l'apparence de petites boules (de quelques millimètres de diamètre à un centimètre environ, voire une dizaine de centimètres exceptionnellement) qui peuvent les faire confondre avec des champignons.
  • D'autres espèces de colonies substantielles forment des ensembles lamellaires, très fins puisque translucides, souvent circulaires à bords renflés ou cloqués et pouvant atteindre de 4 à 6 cm de diamètre. La ressemblance avec une algue ou parfois avec un lichen peut induire des confusions, mais il s'agit bien de bactéries puisque l'individu unicellulaire de la colonie ne possède pas de noyau.
  • La forme prise par d'autres espèces évoque de longs et fins cheveux vert foncé. Ces derniers, qui poussent sur des milieux oligotrophes carencés en azote du plateau de Qinghai et du désert de Gobi ont été très recherchés par la cuisine chinoise qui les utilise sous le nom de « Fat Choy »[16] (Nostoc flagelliforme), notamment lors de fêtes, dont celle de la nouvelle année lunaire. Leur consommation est maintenant interdite en Chine car l'espèce a été tant prélevée qu'elle est menacée de disparition (sur liste rouge). De plus, elle sécrète des toxines (bêta-N-méthylamino-L-alanine) qui peuvent gravement affecter la santé des consommateurs. Enfin, de nombreux produits frelatés ont été vendus. Une autre espèce (en forme de boule) est vendue déshydratée en Chine pour la cuisine[17].

Certaines espèces de Nostoc peuvent parfois être symbiotiquement associées à des champignons ou des végétaux.

Habitat[modifier | modifier le code]

On les trouve là où elles ne sont pas concurrencées par d'autres espèces, c'est-à-dire sur des milieux très pauvres (ou neufs) et exposés à un fort ensoleillement, par exemple sur certains chemins, sur des cailloutis de talus, dans des carrières, sur des rochers, voire sur le bitume, milieux a priori peu favorables à leur développement en ce qui concerne l’approvisionnement en matière azotée d’origine minérale.

Certaines espèces peuvent être trouvées près de la mer.


Caractéristiques biologiques[modifier | modifier le code]

Nostoc au microscope optique (×600) montrant ces cellules vertes photosynthétiques et les hétérocystes plus grosses.

Le genre Nostoc appartient aux Hormogoneae.

Ils forment des structures coloniales (aériennes ou aquatiques) très résistantes aux UV, à la radioactivité[18], aux pH basiques, à la dessiccation[19],[20] et à divers stress environnementaux (chocs thermiques notamment).

Ils ont la capacité de fixer l’azote atmosphérique par l’intermédiaire des cellules particulières : les hétérocystes, qui sont des cellules différenciées à paroi plus épaisse, nettement visibles au microscope. Les hétérocystes apparaissent habituellement aux extrémités des chaînes de cellules sphériques, ovoïdes ou cylindriques. Ces chaînes sont plus ou moins longues. Dans les grands filaments, des hétérocystes peuvent aussi apparaître en position intercalaire. Ils sont issus de la différenciation de cellules végétatives. Le processus de production d'hétérocystes interviendrait quand l'organisme est stressé et carencé en azote minéral. Il s'effectue sur 3 à 7 % des cellules de la colonie.

On trouve des espèces du genre Nostoc dans une grande variété de milieux, de certains déserts à la limite des zones polaires, en passant par les rizières dont la grande fertilité azotée est liée à leur présence. Certaines espèces de Nostoc poussent en épiphytes sur le bas des tiges des plants de riz ou sur certaines espèces du genre Chara (exemple : Gloeotrichia[21]). Le diazote est absorbé par ces cellules spécialisées et transformé en ammoniac, grâce à une enzyme particulière, la nitrogénase, uniquement produite dans les hétérocystes[22]. Au moins chez certaines espèces ou souches, la lumière a une importance dans ce processus[23], de même que la température[24]. On a constaté (2004) que les souches de Nostoc provenant de champs cultivés présentaient de ce point de vue des capacités fixatrices d'azote très différentes par rapport à celles provenant d'environnement « sauvages » ou non cultivés[23].

Reproduction[modifier | modifier le code]

Elle se fait de 3 manières complémentaires :

  1. Par hormogonies (structures mobiles, produites par des jeunes trichomes qui présentent des hétérocystes aux deux extrémités de la chaîne cellulaire). Les akinètes, s'ils sont présents, se trouvent en position intermédiaire (entre deux hétérocystes et sont souvent en chaîne) ;
  2. Par rupture du trichome ;
  3. Via la germination des akinètes.

On connaît au moins un cas (Nostoc punctiforme) de symbiose (endosymbiose) avec un champignon ; Geosiphon pyriformis (Kütz.) v. Wettstein (v. Wettstein, 1915)[25] et d'autres peuvent être associés à des champignons dans certains lichens[26].

Histoire, évolution, paléoécologie[modifier | modifier le code]

Selon les phycologues, des formes fossiles, qui semblent être des formes de Nostoc proches de ceux que nous connaissons, datent au moins du précambrien[27]. Nostoc a peut-être constitué un élément important de nombreuses communautés terrestres et aquatiques depuis cette époque. Les cyanobactéries filamenteuses du genre Nostoc ont en effet, il y a probablement très longtemps, acquis la capacité de résister à des environnements difficiles et de former des structures coloniales microscopiques, macroscopiques voire géantes à leur échelle. Elles sont souvent discrètes, mais communes dans tous les habitats terrestres et aquatiques, jusque sur les glaciers de montagne et dans ou sous les glaces polaires[27].

Écologie[modifier | modifier le code]

Nostoc pruniforme ? (Royaume-Uni)

Par rapport aux autres cyanobactéries[28], le genre Nostoc présente d'importantes spécificités écologiques.

Une grande partie de leur succès dans les environnements émergés difficiles est liée à leur capacité de survie sous forme déshydratée durant des mois ou années, puis à se réhydrater en relançant très rapidement leur métabolisme (dans les heures qui suivent une pluie ou le contact avec de l'eau liquide).

Nostoc résiste également à des cycles répétés de gel et de dégel et aux rayons ultraviolets (notamment dans les habitats benthiques peu profonds et très exposés à la lumière solaire). Grâce à cela, il forme une composante majeure des environnements dits « extrêmes » des habitats terrestres de l'Arctique et de l'Antarctique[27].

Il possède en outre la propriété de fixer l'azote atmosphérique, ce qui l'avantage comme espèce pionnière de certains milieux oligotrophes (ceux qui sont pauvres en azote[27]).

À ce titre, ce genre de bactéries semble jouer un rôle important dans la culture du riz paddy et la productivité biologique des rizières, en y fixant l'azote qui peut ensuite être libéré et réutilisé par le riz. Il joue aussi un rôle dans la formation des néosols et dans l'enrichissement des sols (apport d'azote aux écosystèmes naturels terrestres et aquatiques)[27].

Ses aptitudes en font un concurrent ou un compagnon des lichens, et Nostoc pourrait aussi jouer un rôle encore mal cerné en matière d'interactions durables et plus ou moins symbiotiques avec d'autres espèces (champignons ou lichens), hépatiques, cératophylles, mousses, fougères, cycas, et Gunnera angiospermes[27].

Nostoc fait également preuve d'une bonne résistance à la prédation en formant des colonies (parfois caoutchouteuses, également résistantes au piétinement) assez grandes pour résister aux algivores. Les toxines (microcystine-toxines) qu'il produit jouent sans doute aussi un rôle dans sa résistance à la prédation[27].

Il a néanmoins comme toutes les espèces des « ennemis » naturels, qui en régulent les populations :

  • des virus probablement ;
  • divers organismes mangeurs d'algues ou bactériophages : certains peuvent subsister en ne mangeant que Nostoc, bien qu'il ne soit pas leur source de nourriture préférée[27] ;
  • des cyanophages lytiques peuvent infecter Nostoc[27]

Mais on ignore encore comment sont contrôlées ou rétrocontrôlées les dynamiques des populations de Nostoc dans leur environnement naturel[27].

Génétique[modifier | modifier le code]

Pour nombre de ses caractéristiques, le génome de ce genre intéresse les généticiens et l'industrie biotechnologique[29]. Parmi ces caractéristiques intéressantes, on compte le fait qu'il s'agisse d'un organisme photoautotrophe, à modes de croissance diazotrophes, mais facultativement hétérotrophe ; que ses cellules végétatives aient plusieurs alternatives de développement, y compris pour la différenciation terminale ; qu'il puisse fixer l'azote et produire des molécules complexes lui conférant des chances de survie élevée dans des environnements très difficiles… L'espèce modèle étudiée est Nostoc punctiforme, caractérisé par une grande variabilité phénotypique et de larges compétences en ce qui concerne les symbioses avec des champignons et des plantes terrestres (dont bryophytes, gymnospermes et angiospermes). Son génome a été publié en 2001[29].

Cette espèce de Nostoc s'est avérée être un organisme plus complexe qu'attendu, avec un génome étonnamment important pour une bactérie (8,9 Mb selon le séquençage d'une souche souche de N. punctiforme (ATCC 29133) fait par le Joint Genome Institute ; 45 % des gènes codent des protéines dont la fonction est connue ou probable, et 29 % codent des protéines a priori uniques à N. punctiforme et dont les fonctions sont encore inconnues, mais probablement liées à ses capacités adaptatives ou symbiotiques). Son génome est lui-même « hautement plastique », complexe, avec de nombreuses insertions, des gènes codant des enzymes transposases et des modifications de l'ADN lui-même[29].

N. punctiforme possède environ 400 gènes connus pour coder des protéines kinases impliquant des capteurs, régulateurs de réponse et d'autres facteurs de transcription démontrant que c'est une espèce capable de percevoir les modifications environnementales et de faire preuve de nombreuses adaptations[29].

Substances d'intérêt biochimique, pharmaceutique[modifier | modifier le code]

Toxines[modifier | modifier le code]

De nombreuses bactéries cyanophycées, et tout particulièrement les cyanobactéries filamenteuses, produisent des toxines dites phycotoxines, neurotoxiques, hépatotoxiques ou présentant des effets biocides sur des algues, champignons, animaux prédateurs ou autres, etc.[30]. Elles en produisent parfois plusieurs, ainsi, une souche de Nostoc sp. trouvée dans un lac finlandais s'est montrée in vitro capable de produire une batterie d'au moins neuf peptides hépatotoxiques. Ces toxines ont été isolées, purifiées et étudiées[30]. Nombre d'entre elles présentent des propriétés chimiques et toxicologiques semblables à celles de protéines hepta- et pentapeptides hépatotoxiques produites par d'autres cyanobactéries, mais quelques-unes (P14, P15 et P16) présentent de nouveaux types d'homologues de la microcystine-LR. La toxicité de ces homologues ne semble toutefois pas significativement différente de celle des homologues déjà connus[30], mais pourrait jouer un rôle dans la résistance de la bactérie face à l'évolution des capacités de détoxication de ses prédateurs.

Résistance aux UV[modifier | modifier le code]

Des cultures liquides de Nostoc commun (prélevés in situ) et exposées par des universitaires munichois (fin des années 1990) à une irradiation par UV-B et UV-A ont surproduit certains pigments protecteurs. Les UV-B ont accru la production de caroténoïdes (échinénone et myxoxanthophylle notamment), sans inhiber la production de chlorophylle a. Dans le même temps, la bactérie produisait en plus grande quantité un pigment extracellulaire, soluble dans l'eau, une mycosporine qui absorbe les UV-A/B, associé à la synthèse de glycane extracellulaire. Elle synthétise aussi des scytonemines (pigments extracellulaires liposolubles, connus pour fonctionner comme un écran solaire UV-A). Après une longue exposition, l'effet des UV-B sur la synthèse des caroténoïdes et de la scytonémine cesse, alors que la teneur en mycosporine reste constamment élevée. La production de mycosporine (protectrice contre les UV-B) est exclusivement induite par l'exposition aux UV-B (<315 nm). La synthèse de scytonémine (protectrice contre les UV-A solaires) n'est que légèrement induite par les UV-B (<315 nm), et très fortement par le rayonnement proche des UV-A (350 à 400 nm), mais pas du tout par les UV-A (320 à 350 nm). Ces résultats laissent penser que les synthèses de ces 3 types d'écrans solaires anti-UV sont déclenchées par trois photorécepteurs aux UV différents, qui restent à découvrir[31].

Adaptation aux sels (osmorégulation)[modifier | modifier le code]

Certaines espèces présentent des adaptations osmorégulatrices leur permettant en quelques générations de s'adapter au sel marin. Par exemple Nostoc muscorum, exposé au sel, modifie sa physiologie en plusieurs étapes, et développe de multiples mécanismes de résistance cellulaire, stables et durables face au sel (NaCl), et ceci en quelques générations seulement[32].

Un mécanisme initial combine une stimulation de l'activité photosynthétique, qui permet une accumulation de saccharose utilisé par la cellule comme osmorégulateur. Un mécanisme secondaire implique une adaptation utilisant la fixation de l'azote N2 et la biosynthèse de nouvelles protéines utiles[32].

On a cependant constaté en laboratoire que cette adaptation (la plus efficace en réponse aux stress induits par le sel marin NaCl) ne fonctionnait que partiellement face aux stress induits par KCl ou à des déséquilibres osmotiques de nature non-ionique, par exemple dus au mannitol[32].

Antitumoraux[modifier | modifier le code]

Des toxines cellulaires (cryptophycines) naturellement produites par certaines souches de Nostoc, et antérieurement identifiées dans une souche de Nostoc (ATCC 53789), semblent être de bonnes candidates comme antitumorales et contre le cancer. Elles ont été isolées (publication : 1994) dans une souche (GSV 224) de Nostoc[33]. Elles ont aussi une activité fongicide.

Confusions possibles[modifier | modifier le code]

Exemple de lichen gélatineux dont le photobiontes est une espèce de Nostoc : Collema tenax ici photographié à Kerhuret (Commune de Plogoff, dans le Finistère, en Bretagne, dans l'Ouest de la France).
Autre exemple de lichen gélatineux qui associe symbiotiquement un champignon et un nostoc ; sec, il peut évoquer certains nostocs desséchés

On a souvent confondu les colonies de Nostoc avec des algues : certaines espèces de Nostoc sont aquatiques et certaines grandes colonies de certaines espèces ont une apparence proche de celle de l’ulve (algue marine), mais en brun ou vert plus foncé et en étant plus épaisse et gélatineuse.

Certaines espèces de Nostoc, lorsqu’elles sont desséchées, peuvent évoquer des lichens encroûtants ou gélatineux tels que Collema sp. (presque à juste titre dans ce dernier cas car les photobiontes de ces lichens sont des cyanobactéries du genre Nostoc).

On peut aussi confondre avec certains champignons compte tenu de l'aspect en thalle ou bulles de certaines espèces de Nostoc qui prennent aussi parfois des teintes brunâtres ou noirâtres évoquant l'Oreille de judas.

Utilisations, et soupçons de risques sanitaires[modifier | modifier le code]

Diverses espèces de Nostoc produisent des toxines mais sont pourtant traditionnellement consommées localement.

Ainsi, au Pérou, des populations autochtones recueillent dans les lacs de montagne des colonies de Nostoc (Nostoc commune globulaire, localement dit llullucha[34]). Ces colonies de Nostoc sont mangées, échangées contre du maïs, ou vendues sur les marchés de Cusco ou d'autres villes voisines. Sur les hauts plateaux péruviens, c'est un aliment saisonnier important, consommé seul ou en « Picante » (sorte de ragoût traditionnel)[34] qu'on dit très nutritif[34].

Nostoc commune produit effectivement des acides aminés inhabituels, dont certains du groupe mycosporine, des molécules pouvant contribuer à prévenir les dégâts de l'exposition aux UV (auxquels Nostoc est particulièrement résistant).

Au début des années 2000, 21 échantillons de Nostoc commune sphérique de la région de Cusco ont été analysés ; ils contenaient effectivement de la bêta-N-méthylamino-L-alanine (BMAA), un acide aminé produit par divers taxons de cyanobactéries dites neurotoxiques[34].

La BMAA étant supposée être impliquée dans plusieurs maladies neurodégénératives, ces chercheurs ont en 2008 suggéré d'étudier si la maladie d'Alzheimer ou la maladie de Parkinson étaient plus fréquentes chez les personnes qui consomment le llullucha au Pérou[34].

Au début des années 2000, un nouvel alcaloïde, la nostocarboline (β-carboline alkaloide quaternaire), a été isolé[35] dans une souche de Nostoc (Nostoc 78-12A) trouvée aux États-Unis ; cette molécule semble prometteuse pour traiter la maladie d'Alzheimer, en inhibant l'enzyme butyrylcholinestérase (BChE)[36] aussi efficacement que la galantamine (médicament actuellement utilisé). Elle a été brevetée par l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) [37]. En outre cette nostocarboline, biodégradable et facile à produire, semble aussi avoir des vertus biocides (algicides[38]) qui pourraient peut-être un jour être utilisées en agriculture[37].

État des populations, menaces…[modifier | modifier le code]

Certaines espèces de Nostoc sont encore très courantes.

Quelques espèces (fortement raréfiées sur une grande partie de leur aire de répartition) sont aquatiques et forment des colonies subaquatiques dans les eaux froides, fraiches et oxygénées (exemple :Nostoc verrucosum). En 1999, Mollenhauer et ses collègues alertent sur le fait que les formes de colonies macroscopiques de Nostoc aquatiques sont négligées par les inventaires naturalistes et en danger dans la biodiversité subaquatique européenne[39].

Exemple d'espèces[modifier | modifier le code]

Il existe de nombreuses espèces de Nostoc (punctiforme, flagelliforme, commun…).
Quelques espèces forment des colonies macroscopiques un peu plus faciles à identifier que les autres (ex. : Nostoc caeruleum, Nostoc commune, Nostoc microscicum, Nostoc parmelioides, Nostoc pruniforme, Nostoc verrucosum et Nostoc zetterstedtii).
Le génome de certaines espèces a été étudié.

Galerie illustrative[modifier | modifier le code]

Liste d'espèces[modifier | modifier le code]

Selon AlgaeBase (14 déc. 2010)[40].

Selon le World Register of Marine Species (14 déc. 2010)[41].

Selon ITIS (14 déc. 2010)[42].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

Références taxinomiques[modifier | modifier le code]

Notes et autres références[modifier | modifier le code]

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  2. M. M. ( Behren-lès-Forbach), « Le coin du jardinier : Les nostocs », Le Républicain Lorrain,‎ (lire en ligne)
  3. Dittes, « Photo de Nostoc sp », sur University of California, Berkeley.
  4. leculler, [1] Dartmouth IGERT – Polar Environmental Change « The Arctic finally warms up : Getting ready for an expedition! » Local Knowledge June 15, 2011
  5. voir par exemple Voir paragraphe consacré au « Fat Choy » (Nostoc flagelliforme)
  6. Herdman, M., Castenholz, R. W., & Rippka, R. (2001). Form‐Nostoc. Bergey's Manual of Systematics of Archaea and Bacteria.(résumé)
  7. Komarek, J., & Anagnostidis, K. (1989). Modern approach to the classification system of cyanophytes. ; Nostocales. Arch Hydrobiol Suppl 823 (Algol Stud 56), 247-345.
  8. Rippka, R. (1988). Recognition and identification of cyanobacteria. Methods Enzymol 167, 28-67.
  9. a et b Henson, B. J., Watson, L. E., & Barnum, S. R. (2002). Molecular differentiation of the heterocystous cyanobacteria, Nostoc and Anabaena, based on complete nifD sequences. Curr Microbiol 45, 161–164.
  10. Tamas, I., Svircev, Z., & Andersson, S. G. (2000). Determinative value of a portion of the nifH sequence for the genera Nostoc and Anabaena (cyanobacteria). Curr Microbiol 41, 197–200.
  11. Rasmussen, U., & Svenning, M. M. (1998). Fingerprinting of cyanobacteria based on PCR with primers derived from short and long tandemly repeated repetitive sequences. Appl Environ Microbiol 64, 265-272.
  12. The GenBank/EMBL/DDBJ accession numbers are AJ630408AJ630458 for the 16S rRNA gene sequences, AJ632022http://ijs.sgmjournals.org/external-ref?link_type=GEN&access_num=AJ632070 AJ632070] for the rbcLX gene sequences and AJ628068–AJ628134 for rpoB gene sequences determined in this study.
  13. Pirjo Rajaniemi, Pavel Hrouzek, Klára Kaštovská, Raphaël Willame, Anne Rantala, Lucien Hoffmann, Jiří Komárek et Kaarina Sivonen, « Phylogenetic and morphological evaluation of the genera Anabaena, Aphanizomenon, Trichormus and Nostoc (Nostocales, Cyanobacteria) », IJSEM, vol. 55, no 1,‎ , p. 11-26 (DOI 10.1099/ijs.0.63276-0, lire en ligne)
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  15. (en) B.A. Whitton, Malcolm Potts, M. Potts, The Ecology of Cyanobacteria. Their Diversity in Time and Space, Springer Science & Business Media, (lire en ligne), p. 496-497.
  16. page de la Wikipédia anglophone sur le Fat Choy
  17. S. Facciola, Cornucopia II: A Sourcebook of Edible Plants, 1998
  18. Kraus, M. P. (1969). Resistance of blue-green algae to Co gamma radiation. Radiat Bot 9, 481-489.
  19. Shirkey, B., Kovarcik, D. P., Wright, D. J., Wilmoth, G., Prickett, T. F., Helm, R. F., Gregory, E. M. & Potts, M. (2000). Active Fecontaining superoxide dismutase and abundant sodF mRNA in Nostoc commune (Cyanobacteria) after years of desiccation. J Bacteriol 182, 189±197.
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Liens externes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

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